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Lettres à une chimère
20 février 2002

Le chien à son pépère (toi, tu écrirais mémère, mais bon...)

Bon.

Faut pas que je te monte un mur des lamentations pour le plaisir d'une guerre faussement juive.

Faut pas que je vire pathétique, hermétique à la légèreté, jeune vieux désenchanté, désabusé par les illusions et les paradis perdus.

Faut pas que j’égare l'ersatz de ma dignité, drapé soyeux, made in Korea et par conséquent aussi bon marché que de mauvaise qualité, en tapinant ces lignes de mes bouts d'âme. Car il est clair que la police de (mauvais) caractères ne m'arrachera pas de ce bitume-ci... Et cependant...

Je ne sais si tu es l'objet de telles conversations dans ton jeune quotidien, mais ce que nous avons échangé hier, ce que je t'ai dit, et même la plupart du temps écrit, c'était cadeau pour offrande que de te les donner. Il n'est pas dans mes cordes, celles qui m'enchaînent à mes inhibitions, mes interdits, de sombrer dans la confidence, la larme à l’œil, le trouble faste, luxueux, les trémolos, les silences susurrés, ces confidences d'affreuses banalités pour un immortel lambda mais d'une cruauté de diamant pour un novice introverti.

Diamant, parce que j'y tiens, c'est mon histoire, la (dé)construction de ma personnalité, le fiasco magnifique d'une réussite annoncée évaporée par je ne sais quelle diabolique négligence ! Et cruauté car je n'accouche pas nécessairement du fond de mon être de ce genre de déclarations sentimentales, sentimentales au sens noble, pas miséreuses. Car pour enfanter, il faut avoir été séduit par un charme, avoir accepté que quelque chose pénètre en soi et laisser fertiliser son terrain, un jour d'ovulation plus ou moins réceptif... La métaphore est peut-être un peu triviale, je ne trouve plus les mots justes, je suis sous l'emprise de mes drogues, pardonne-moi, mais je crois tenir l'idée.

Ce que j'ai avoué, mais le mot "aveu" me semble déplacé, connoté bien trop négativement, je ne sombre pas dans un crime, je le revendique. Comment pourrait-il en être autrement ? Je connais trop l'inertie de mon cœur, celle de mon corps aussi, pour ne point pouvoir identifier le sursaut de vie, l'émoi en moi, et moi et moi. Je suis assurément un débutant en matières de cœur, hétéro, "hétéroflexible" ou "bipolarisé" (j'aime bien ces mots de toi, ils sont drôles !), je n'ai pas grand chose à apporter là dessus, seulement ma dévotion, mes derniers espoirs de vie urgente, mon regard sur ce que je tolère spontanément et ce que je ne puis supporter. C'est certes peu, mais c'est encore une fois sincère. Pas d'expérience pour moi autre que binaire donc, mais une tête suffisamment honnête pour retrouver les joies, les affres, les amours (presque) insouciantes et les quasi haines en kit que le cœur emballe, déballe, cadeaux divers, remerciements et autres reproches aussi injustes que bien placés. Et ainsi, parfois pour toi, un jour peut-être, comme un poison dans Lo, je suppose.

Pardon de cela. Mille fois pardon. C'est parce que tu comptes pour moi depuis, de plus en plus, que je me fais mal. Et je dis sciemment "je" ici. Allez, je prends le drame là où je peux le trouver quitte à le faire mousser dans une obsession tout ce qu'il y a des plus amoureuses, je ne m'y trompe plus, et je me dis que fatalement tu rates certaines choses avec moi, insignifiantes ou si peu indispensables, mais qui me feraient un peu de soleil dans ma crypte. Beaucoup de galimatias pour te dire que j'aurais aimé, vraiment, un petit mot, pas un anodin, pas un futile, juste un pile poil dans le cœur, comme le bizou d'hier à la fin du chat (c'était une belle réponse de ta part, je l'ai bien notée, crois-moi). Je venais de me violer tout seul et tout cru, certes, mais violé quand même pour ton adorable personne et sa cam interposée ! La situation est surréaliste mais je n'ai pas de regret, c'était un grand moment pour moi. Au moins tu sais, tu sens, tu vois où j'en suis, tu m'y accompagnes, tu me suscites des désirs, des velléités de tendresse à ton égard, et moi, j'aime ça. J'assume. C'est dit.

J'ai peut-être tout faux mais j'ai bonheur de tenir en mon sein l'idée de la présence de quelqu'un que j'aime, dores et déjà un ami assurément, un potentiel énième amant moyennement, un compagnon de vie sincère et fidèle chaque fois plus volontiers. J'ai peur, j'avance. Ca ne fera pas de moi un être pire (et le pire est affaire ici de morale judéo-chrétienne et de codes sociaux aussi petits qu'irrespectables), ça fera le Jérôme que certains se sont plu à aimer. "J'ai changé, sachez-le, mais je suis comme avant, comme me font, me laissent et me défont les temps..." Tu le sais. Je ne te bluffe pas. Et je trouve tes craintes à mon égard... décalées... quand ce sont précisément les mêmes que je suis en droit d'appréhender de toi. Mais qui a raison qui a tort. Je sais aujourd'hui, trente ans derrière moi, que ma vie sentimentale et a fortiori érotique aura été un fleuve tranquille, le genre où la plupart des individus trouveraient à s'emmerder à mourir. Moi, j'aime une fois et j'espère que c'est pour toujours. Deux, c'est encore envisageable avec des garanties. Mais trois, ce sera au-dessus de mes forces.

Je suis entier, exigeant mais fidèle, incomplet et en sursis. Je n'ai plus de temps à perdre, tu le sais. Je change éventuellement mais pas pour devenir un interchangeable. J'étais un Saint, je ne serai pas une pute pour autant dès que j'aurai touché à une nouvelle ère, une nouvelle histoire...

Alors ? Pourquoi je te dis tout cela ? En plus je tape mal, je double-consonne, les médicaments agissent, je me perds, je perds le style, je perds, je tourne, je sombre. Ouh la la...

Juste une chose qui me tient à cœur : quand je te donne ce que je ne donne pas à d'autres, ne me laisse jamais l'impression de le brader. Je t'ai expliqué ma théorie de la faille. Je trouverai toujours une lézarde, mais je peux réparer avec un geste, un petit mot gentil de ta part, loin des futilités habituelles, banalités de collégiens un peu en rut, que l'on se balance lestement parfois (et que j'apprécie aussi, crois-moi !).Ton silence m'a donc blessé aujourd'hui, tu le sauras. Pardon mon Lo, mais ne rends jamais mes aveux anodins quand tu en es le dépositaire exclusif, l’Elu en somme.

Le seul garçon à qui j'ai jamais dit "je t'aime".

Je ne te l'avais pas dit ? Brouillé par des métaphores physiologiques sur le cœur qui bat (c'est son rôle, merde !), tu n'avais pas saisi LA REPONSE A UN MILLION ?

Eh bien, voilà, si tu avais omis l'idée hier soir, tu as les mots. Ou les maux. C'est selon. Mais tu vois en mon âme comme en plein jour si tu le souhaites... Je n'y ferai pas obstacle, je n'ai plus rien à perdre à ce jour....

Le reste est point de détail pour moi... si rien à perdre, rien ne va plus donc !

Et, qui sait, à l'instar d'un Cyrano un peu détourné par un Rostand licencieux : "A la fin de l'envoi... je couche !"

Bien à toi, mon Grand Circoncis, avec mon entière amitié. Et davantage (mal)heureusement.

 

- l'autre moitié du "joli petit couple"

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